vendredi 9 août 2013

Balade découverte dans le Diois (seconde partie)

Pour la suite de notre balade découverte, nous nous dirigeons vers les sous-bois des pentes de la "montagne" locale.

La Butte de l'Aigle (945m).
En premier plan, un véritable champ de carottes.

Mais avant cela, nous commençons par une petite escale sur les collines marneuses. Très sèches, avec une exposition plein sud, peu de végétaux osent s'installer dans de telles conditions, et pourtant...

Thym commun (thymus vulgaris).
Omniprésent dans la région et plus au sud où il prend le nom de "farigoule", il n'est même plus nécessaire de le présenter. Pour l'identifier, le nez suffit !


Laser odorant (laserpitium gallicum).
Autre habitué des collines sèches sur lesquelles il déploie ses grandes ombelles, ses feuilles très parfumées remplacent le persil dans tous ses usages, surtout au printemps lorsqu'elles sont jeunes et tendre (c'est à dire avant l'apparition des hampes florales). 

 Laser odorant (laserpitium gallicum).
Alors que l'été est maintenant bien installé, les fleurs des ombelles ont laissé place à de nombreux akènes dont les ailettes translucides capturent la lumière. Ils peuvent être utilisés en infusion, mais ils n'ont pas la puissante saveur des feuilles. Ces dernières sont devenues coriaces mais peuvent toujours être utilisées, à condition de les hacher très finement dans des plats cuits.

Après ce petit crochet par les marnes, nous prenons le chemin caillouteux qui nous mènera dans les sous-bois. Il est lui aussi bordé de nombreuses plantes remarquables...

Chicorée sauvage (cichorium intybus).
La plante sauvage est l'origine des sous-espèces cultivées pour produire les "chicons" (endives) en pousse forcée mais aussi confectionner un simili-café par torréfaction des racines (l'ami du petit-déjeuner, ça ne vous dit rien ?). On peut en consommer les jeunes feuilles au printemps (mais il faut savoir apprécier l'amertume) ou se faire son propre "café" en récoltant les racines dès l'automne.

Laitue scariole (lactuca serriola).
Difficile, en voyant les côtes de ses feuilles hérissées de pics, d'imaginer que c'est probablement elle l'ancêtre de la plupart des laitues cultivées. C'est un peu plus facile lorsqu'elle est à l'état de rosette, avant la montée de sa hampe florale. Ce n'est qu'à cette période que ses feuilles sont pratiquement dénuées d'amertume et également plus tendres. Les pics hérissant leur côte sont tellement doux qu'on ne les sent même pas.

Laitue à feuilles de saule (lactuca saligna).
Très proche de la précédente, elle s'en distingue par des feuilles très allongées, sans pics sur la côte et non denticulées. Les feuilles hautes sont souvent munies d'oreillettes aiguës à leur base. Comme toutes les laitues (dont la précédente), lorsqu'on casse sa tige ou qu'on lui coupe une feuille, elle sécrète un latex blanc qui est à l'origine de son nom. 

Salsifis des prés (tragopogon pratensis).
Autre plante à latex, le sien est blanc lorsqu'il commence à s'écouler, mais brunit rapidement en s'oxydant. En séchant, il se transforme en colle. Attention donc à ne pas marquer ses vêtements avec, car les taches résultantes seraient pratiquement indélébiles. Au printemps, on peut en consommer les boutons floraux et les jeunes hampes florales (avant éclosion des fleurs) à la manière d'asperges. Sa racine, pour laquelle il est le plus connu, peut être récoltée dès l'automne. Difficile à trouver à l'état sauvage avant qu'il ne monte et que le tubercule ne devienne immangeable car trop ligneux, il faut procéder en deux temps : d'abord repérer les coins où il pousse en quantité en localisant ses fleurs au printemps, puis attendre 6 mois pour en chercher les rosettes (le lait des feuilles permet alors de limiter les confusions).

Petit calament (Clinopodium nepeta).
Son odeur fortement mentholée pourrait facilement le faire passer pour une menthe, qu'il peut remplacer dans la plupart de ses usages. Mais son parfum est aussi doté d'une petite touche camphrée qui n'est pas du goût de tout le monde. Le meilleur moyen pour se faire un avis, c'est encore de le goûter... 

Mélisse officinale (melissa officinalis).
Les avis sur la qualité de son parfum sont beaucoup plus unanimes que pour le petit calament. Par ces fortes chaleurs, pour profiter pleinement de ses fragrances citronnées, il vous suffit d'en cueillir 3 beaux brins et de les froisser juste avant de les placer au fond d'une carafe d'eau bien froide. En quelques minutes, l'infusion à froid s'opère pour donner une eau délicieusement parfumée et surtout très rafraîchissante. Et pour le soir, à l'heure de l'apéritif, pourquoi ne pas remplacer la menthe d'un mojito par de la mélisse ?

Aigremoine eupatoire (agrimonia eupatoria).
Sans réel intérêt culinaire, on retiendra surtout qu'on peut en infuser les sommités florales et ainsi profiter de ses diverses propriétés médicinales (vulnéraire, anti-inflammatoire, etc.). Par ailleurs, le goût d'une telle infusion n'est pas désagréable... A noter : L'aigremoine fait partie de ces plantes produisant des fruits munis de crochets ayant la fâcheuse tendance à s'agripper au moindre morceau de tissu passant à proximité.

Biscutelle (peut-être biscutella laevigata).
Cette plante est une cousine des choux (famille des brassicacées). A ce titre, elle est très probablement comestible... Mais attention aux généralités, car la famille compte quand même de rares exceptions toxiques (parmi lesquelles le vélar et la giroflée). Bien que n'étant pas des poisons violents, ces deux-là n'en sont pas moins toxiques. Pour avoir personnellement goûté les feuilles de la biscutelle, je peux affirmer qu'elle n'a aucun intérêt gustatif. Par ailleurs, certaines espèces de biscutelles sont protégées localement. Du coup, ce qui est plutôt remarquable chez cette plante, ce sont ses fruits évoquant des paires de lunette.

Trèfle bitumineux ou  psoralée bitumineuse (bituminaria bituminosa).
Probablement non toxique comme la plante précédente, l'odeur de ce cousin du trèfle des prés (famille des fabacées)   est de toute façon dissuasive : en effet, une forte odeur de bitume est produite par les fleurs et les feuilles, surtout lorsqu'on les froisse. Cette caractéristique remarquable, à laquelle elle doit d'ailleurs son nom, lui vaut aussi une photo dans ce billet.

Panais (pastinaca sativa).
Celui-ci est surmonté d'une punaise arlequin (graphosoma italicum), qu'on trouve fréquemment sur ses ombelles.
On se méfiera de cette plante dont le suc peut être très photosensibilisant, au point que combiné à une forte exposition solaire, il peut générer des brûlures laissant des marques presque indélébiles sur la peau. C'est pourtant ce même panais dont on trouve les énormes tubercules sur nos marchés. Leur délicieuse saveur anisée est également présente dans les racines sauvages et il semble qu'elles compensent leur petite taille soit par leur parfum plus intense. S'agissant d'une bisannuelle, la racine peut être récoltée dès la fin de la première année jusqu'au printemps de la seconde, avant que la plante ne montre.

Carotte (daucus carota).
Les ombelles de la carotte sauvage sont omniprésentes en ce moment. Repérables aisément à l'aide d'une fleur centrale plus sombre (généralement noire ou rouge), on utilise aussi la présence de poils pour la distinguer des très toxiques ciguës (petite et grande). Ses racines étonnent toujours le néophyte par leur couleur blanche, mais leur odeur ne trompe pas. Elles sont généralement trop petites pour être consommées en légume, mais elles peuvent être utilisées pour parfumer un bouillon de légumes. On pourra aussi utiliser les graines (on peut voir sur la photo le "nid" très typique formé par une ombelle de fruits) pour donner, par infusion, un parfum de poire à des desserts. Les feuilles quant elles peuvent être utilisées en remplacement de persil.

Panicaut des champs (eryngium campestre).
Contrairement à ce qu'on pourrait croire, cette feuille n'appartient pas à un chardon mais à un cousin de la carotte et du panais (famille des apiacées, anciennement ombellifères). Consommables très jeunes, alors qu'elles sortent tout juste de terre, les feuilles du panicaut deviennent vite coriaces et surtout très piquantes. Plus tard, il faut absolument essayer la moelle des jeunes tiges florales, dont la saveur sucrée et très aromatique est très agréables. Il faut juste réussir à peler la tige sans se piquer ! Attention : Ses congénères Alpines et maritimes (toutes deux d'une couleur bleutée) sont également comestibles, mais sont des espèces protégées au moins localement.

Vigne (vitis vinifera).
Dans une région viticole, il est inévitable de retrouver quelques cèpes ceps retournés à l'état sauvage, ne serait-ce que dans d'anciennes vignes oubliées. On se rend alors compte que la vigne est véritablement une liane. On peut avoir la chance de tomber sur quelques grappes à la fin de l'été, mais avant, les feuilles (non traitées par la force des choses) peuvent être utilisées pour préparer des feuilles de vigne farcies.
Luzerne (medicago sativa).
Elle aussi est probablement une rescapée de quelques champs à fourrage cultivés à proximité, mais elle n'en est pas moins une plante comestible dont les germes, en particulier, sont très appréciés. Heureusement pour les humains qui la consomme, nous ne risquons pas le phénomène de météorisation dont les ruminant peuvent être victime en la consommant en trop grande quantité.


Pimprenelle (sanguisorba minor).
Ses belles petites feuilles ont une saveur évoquant le concombre, mais étant donnée sa taille, c'est essentiellement de décoration comestible qu'elle servira. Au printemps, il est toutefois possible de trouver de toutes jeunes rosettes qui peuvent réellement agrémenter une salade. 

Ça y est, nous approchons enfin des sous-bois, mais pour savoir ce que nous y avons vu, il faudra attendre la troisième partie...

3 commentaires:

  1. Des "cèpes" retournés à l'état sauvage qui donnent des... vignes... inévitablement, j'adore, c'est miraculeux, chez toi, Nicolas ;)))) J'ai toujours ton infusion de calament à la maison (en Bretagne), j'espère qu'on la dégustera tranquillement ensemble bientôt... sur place... Et il faudra vraiment que tu me donnes des leçons pour la carotte sauvage, je n'arrive à la reconnaître qu'en fleurs bien avancées ou en graines... Je reste prudente pour cette plante à cause des risques de confusion...

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    1. Faute corrigée (l'orthographe n'a jamais été mon fort)... On va dire que c'est parce que la vigne n'était justement pas traitée que les champignons ont contaminé les ceps pour les transformer en cèpes ;-)
      Le calament que j'avais amené chez toi était celui à grande fleurs, au parfum beaucoup plus fin et subtil que le petit calament (j'en ai justement cueilli hier, il est en plein séchage). On a raté l'occasion de le boire ensemble ce printemps, mais ce n'est que partie remise.
      Quand aux leçons sur la carotte sauvage, c'est effectivement important de ne pas se tromper, d'autant que chez toi, il y a aussi l’œnanthe safranée, elle aussi très toxique (et qui en plus sent bon, contrairement aux deux ciguës). Ça en vaut la peine car les carottes sauvages qui poussent dans le sable littoral ont souvent de belles racines (pas comme ici où elles sont fines, biscornues et ramifiées à cause des cailloux).

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  2. Salut Nico,

    Long time no see. Je suis de passage dans le Sud de la France et le retour dans l'Ouest est prévu le 15 aout (avant le grand retour à Montréal le 20). Si jamais tu es toujours en pays diois cette journée, ca nous ferait plaisir de passer te faire un petit coucou. On doit justement passer voir Patrick à Crest le 15 au soir.
    Je n'ai pas réussi à te rejoindre sur le ton portable, probablement que le numéro que j'ai date de plusieurs années. Mon courriel n'a pas changé de mon coté.
    A+

    Arnaud

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