mardi 24 mai 2016

Attention, ça pique !

Difficile de croire, lorsqu'on découvre le fragon pour la première fois, que cette plante est capable de produire quelque chose de comestible, et pourtant...

Le fragon (ruscus aculeatus) ou petit houx forme des buissons denses et impénétrables à cause des pointes situées au bout de ce qui pourrait être aisément pris pour ses feuilles. Mais aussi étonnant que cela puisse paraître, ces excroissances ovales et aplaties sont en fait des rameaux, et plus précisément ce qu'on appelle des cladodes. Sur la photo, on peut d'ailleurs apercevoir une fleur au centre de la face inférieure de la plupart d'entre-elles (points d'une teinte violacée) et même un fruit (la boule rouge).
Bon... une chose est certaine, ce n'est pas du côté des branches matures qu'il faut se tourner. Avec toutes ces pointes, même après des heures et des heures de cuisson, impossible d'envisager pouvoir en faire quelque chose.
Et les fruits alors ? Leur couleur rouge pousse à la méfiance. Et pour cette fois au moins, à raison : car même si c'est très loin d'être une règle vérifiable systématiquement, dans le cas du fragon, les saponosides contenues dans les fruits sont toxiques (hémolytiques). Les fruits sont donc à proscrire.

Jeune pousse de fragon, mais un peu trop avancée pour être récoltée. En effet, à ce stade, non seulement la tige devient ligneuse, mais les cladodes et en particulier leur pointe, commencent à durcir. Sur la photo, on peut déjà les deviner le long des future rameaux. Mais on est encore loin du stade de leurs voisines de droite. A noter aussi que plus les pousses sont jeunes, moins elles sont amères.

Mais au printemps, le temps de quelques jours, voire quelques semaines, les jeunes pousses passent par un stade où leur aspect tient plus de l'asperge. Dépourvues de chlorophylle au tout début de leur développement, elles sortent de terre toutes blanches. En montant, elles se teintent souvent de violet avant de virer au vert. Et c'est justement pendant toute cette période que ces jeunes pousses peuvent être récoltées et être préparées comme des asperges, avant qu'elles ne deviennent ligneuses et se couvrent de pointes dissuasives.

Il est préférable de récolter les pousses du fragon tant que leurs rameaux ne se sont pas ouverts. Elles se cueillent à la main, par simple torsion : en se contentant d'une longueur maximum d'une vingtaine de centimètres, celles-ci cassent net.

Pour les préparer, il vaut mieux commencer par les blanchir, ce qui neutralise une partie de leur amertume : on les ébouillante rapidement (3 petites minutes) avant de les plonger dans de l'eau glacée.

Les pousses de fragon peuvent se consommer comme des asperges. Ici, blanchies puis sautées avec un peu de coppa, déglacées au vinaigre balsamique et finies avec quelques copeaux de parmesan.

En général, après les avoir blanchies, à moins de n'utiliser que des pousses très jeunes, l'amertume n'a pas totalement disparu, mais elle est plutôt agréable : En bouche, elle évolue assez rapidement sur une note de réglisse avec une petite touche sucrée. Personnellement, j'adore !
Pour la neutraliser encore plus, on peut jouer avec l'acidité : soit avec l'eau de cuisson dans laquelle on rajoute du vinaigre blanc (attention au dosage, le vinaigre pouvant rapidement masquer totalement le goût du fragon), soit dans l'accompagnement (vinaigrette, vin blanc, tomates etc.).

Dernière remarque: L'utilisation du fragon (ruscus aculeatus) est réglementée dans plusieurs département. On peut trouver un tableau synthétique de ces réglementations [ici].

2 commentaires:

  1. Bonjour! J'adore votre blog, mais vu que vous cueillez des plantes au ras du sol, vous n'avez pas peur que des chiens, chats, renards etc.. aient uriné dessus (échinococcose, rage... ou même sans maladies, c'est pas top!)? Merci en tout cas de partager tout ça, ça donne envie! ;)

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    1. Pour ce qui est de la préparation présentée dans cet article, le fragon y est doublement cuit (blanchi + sauté), le risque de transmission de parasitose est donc nul ou quasi-nul.
      Mais les risques de parasitose ne sont pas à prendre à la légère. J'en parle d'ailleurs dans [cette page] à la rubrique "Précautions".
      Lorsqu'il m'arrive de préparer du sauvage cru, c'est soit qu'il est hors d'atteinte de contamination du fait de sa hauteur/position (au passage, la propagation de l'échinocoque se fait par les crottes et non l'urine) soit dans des lieux dans lesquels j'ai confiance (mais tout est relatif).
      Et pour relativiser justement, il faut noter que ces risques ne concernent pas que la consommation de plantes sauvages. Quelqu'un qui vivrait en zone rurale dans une région fortement contaminée (France-Comté par exemple) et qui consommerait crues des salades, des fraises, des tomates, etc. qu'il cultive dans un potager sera tout autant exposé, si ce n'est plus pour peu qu'il ait un chien ou un chat. En effet, les vecteurs ne se résument pas aux renard, mais à la plupart des mammifères, y compris domestiques.

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